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Et si l’Afrique exploitait ses ressources ? Une projection sur un continent riche de potentialités inexploitées

L’Afrique est souvent décrite comme un continent aux immenses richesses naturelles, mais paradoxalement, elle reste l’une des régions du monde les plus pauvres en termes de développement économique. Pourtant, les sous-sols africains regorgent de ressources minières telles que le pétrole, le cobalt, le cuivre, l’or, le diamant, ainsi que des terres arables et des ressources énergétiques comme l’uranium et l’énergie solaire. Si ces ressources étaient exploitées de manière efficiente, durable et équitable, elles pourraient propulser le continent vers une croissance économique semblable à celle observée dans d’autres régions du monde. Dans cet article, nous explorons ce que pourrait devenir l’Afrique si elle tirait pleinement profit de ses ressources naturelles, tout en donnant des exemples concrets de domaines technologiques et des axes d’investissement qui apporteraient des changements profonds et durables.

Les réserves inexploitées : un trésor enfoui

Pétrole et Gaz naturel : l’or noir et bleu

L’Afrique détient environ 7,5 % des réserves mondiales prouvées de pétrole, et des pays comme le Nigeria et l’Angola sont parmi les plus grands producteurs sur le continent. Pourtant, malgré ces richesses, la plupart de ces pays continuent de dépendre des importations pour des produits transformés à base de pétrole, faute de raffineries et d’infrastructures modernes.

En comparaison, les pays du Moyen-Orient ont su transformer leur production pétrolière en un levier de développement massif, comme c’est le cas aux Émirats Arabes Unis, qui ont investi dans des villes futuristes et diversifié leurs économies grâce aux revenus générés par le pétrole. Si l’Afrique exploitait ses réserves de pétrole et de gaz pour non seulement exporter mais aussi créer des chaînes de valeur locales, elle pourrait répondre à sa demande intérieure en énergie et devenir un acteur global dans le secteur des énergies renouvelables, en investissant dans l’hydrogène ou les biocarburants.

Un espoir colossal est né dernièrement du côté du Nigéria avec l’inauguration en 2023 de la raffinerie de pétrole créée par le magnat du ciment en Afrique, Dangote. C’est une raffinerie qui a la capacité de traiter environ 650.000 barils de pétrole brut par jour, ce qui en fait la plus grande raffinerie à train unique au monde. La raffinerie répondra à 100 % des besoins nigérians en produits raffinés et disposera également d’un excédent de chacun de ces produits pour l’exportation. La raffinerie de pétrole Dangote est un projet de plusieurs milliards de dollars qui créera un marché de 21 milliards de dollars par an pour le brut nigérian. Il est conçu pour traiter le brut nigérian avec la possibilité de traiter également d’autres bruts.

Ce projet a néanmoins connu un départ difficile à cause notamment de désaccords entre le gouvernement nigérian et la Dangote Petroleum Refinery. Cependant, une réunion du Conseil Exécutif Fédéral présidée par le président en exercice Bola Tinibu a permis de trouver une série d’accords qui nous espérons, permettront la pleine marche de ce projet.

Du côté du Niger, le pipeline Niger-Bénin qui a permis de porter la production pétrolière à 110.000 barils par jour (avec une projection à 200.000 par jour en 2026) dont 90.000 doivent être exportés quotidiennement est également un espoir de développement pour ce pays catalogué comme l’un plus pauvres du monde.

Cobalt et Cuivre : les métaux stratégiques des batteries et des énergies vertes

La République Démocratique du Congo (RDC) produit à elle seule plus de 70 % du cobalt mondial (plus de 170.000 tonnes en 2023 d’après Statista), un métal essentiel à la fabrication des batteries pour les véhicules électriques et les appareils électroniques. À cela s’ajoutent les vastes réserves de cuivre, utilisé dans les infrastructures électriques et les énergies renouvelables. Or, les pays africains sont encore loin de profiter pleinement de cette ressource, exportant en grande majorité du minerai brut plutôt que de l’exploiter pour des industries locales à forte valeur ajoutée.

Si l’Afrique investissait dans des infrastructures de transformation du cobalt et du cuivre, elle pourrait devenir un acteur mondial dans la production de batteries et dans la chaîne d’approvisionnement des énergies renouvelables. En effet, mettre en place des industries de transformation de ces métaux seraient un vrai “game changer”. Pour le Cobalt on pourrait donner en exemple la mise en place d’industries aérospatiale, chimique et de fabrication de batteries. Ces dernières sont totalement indispensables de nos jours tant elles sont utilisées dans tous les appareils du quotidien. Pour le Cuivre, la création de grosses compagnies de fabrication de systèmes de freinage, de radiateurs, de construction de matériaux de plomberie et surtout de câbles électriques et composants électroniques sont quelques exemples.

Les prix à la tonne du Cobalt et du Cuivre étant respectivement de 32.750,38 USD et 8.341,00 USD selon la conjoncture de la Banque centrale du Congo, je ne peux que vous laisser imaginer les sommes faramineuses que rapporteraient des industries qui transforment ces métaux précieux. Des pays comme la Chine ont su capitaliser sur ces ressources pour devenir des leaders mondiaux dans l’industrie technologique. En adoptant une stratégie similaire, l’Afrique pourrait créer des millions d’emplois et devenir un moteur de la révolution des énergies propres.

L’uranium : une opportunité pour l’énergie nucléaire

L’Afrique, et particulièrement des pays comme le Niger et la Namibie, détient d’importantes réserves d’uranium. Ce métal est crucial pour la production d’énergie nucléaire, une source d’électricité à faible émission de carbone qui pourrait aider le continent à répondre à ses besoins énergétiques croissants tout en respectant les objectifs climatiques.

Des pays comme la France, via des entreprises comme Orano (anciennement Areva), exploitent depuis des décennies l’uranium africain pour alimenter leurs propres centrales nucléaires. Pourtant 4e producteur d’uranium au monde et 2e fournisseur d’Orano, 60% de la population vit avec moins d’1$ par jour. En France, une ampoule sur trois est éclairée grâce à l’uranium nigéren pendant qu’au Niger, près de 90% de la population n’a pas accès à l’électricité.

D’après un rapport d’Oxfam nommé “Niger: à qui profite l’uranium” qui date de 2013 lorsque le Niger renégociait les contrats miniers avec Areva, le pays exportateur de “yellow cake” n’avait empoché en 2010 que 13% (environ 459 millions d’euros) des 3,5 milliards d’euros des recettes liées à l’exportation des 114.346 tonnes d’uranium. Si le Niger avait investi dans l’exploitation et la transformation locale de son uranium, les résultats auraient été spectaculaires. En se basant sur des estimations des revenus générés par l’uranium au fil des décennies, le Niger aurait pu :

Capitaliser sur son uranium

Vendre directement son Uranium au prix du marché et multiplier ses revenus directs issus de l’exploitation minière.

Intégrer la transformation locale d’énergie nucléaire pour satisfaire ses besoins en électricité et ne plus être dépendant de ses voisins. Par exemple, une centrale nucléaire de 2 000 MW pourrait fournir de l’électricité à plus de 1 million de foyers africains, réduisant considérablement les coupures de courant fréquentes.

Utiliser ces revenus pour financer des infrastructures essentielles, telles que des hôpitaux, des routes, des écoles et des projets de développement économique.

Réduire sa dépendance à l’aide internationale, créant ainsi une économie plus autosuffisante.

L’énergie solaire : un atout majeur pour l’électrification du continent

Exploiter l’énergie solaire : électrifier l’Afrique

L’Afrique bénéficie d’un ensoleillement exceptionnel, avec plus de 300 jours de soleil par an dans certaines régions. Pourtant, environ 600 millions d’Africains n’ont toujours pas accès à l’électricité. L’énergie solaire pourrait changer cette réalité.

Le Maroc l’a bien compris et a pris les devant avec la centrale solaire de Noor, l’une des plus grandes au monde avec une capacité de 580 MW, qui peut alimenter environ 1 million de personnes. C’est un projet colossal qui s’etendra à sa phase finale sur 3.093 hectares (soit la taille de 3.457 terrains de football ou encore la superficie de Rabat) et permettrait de couvrir 52% des besoins énergétiques du pays d’ici 2030 tout en évitant le rejet de 240.000 tonnes de CO2 chaque année (selon la Banque Africaine de Développement).

Imaginons si des investissements massifs étaient réalisés dans l’énergie solaire : selon le rapport World Energy Outlook 2023 de l’Agence Internationale de l’Énergie (AIE), un programme d’installation de fermes solaires d’une capacité totale de 100 GW (l’équivalent de 50 centrales Noor) pourrait fournir de l’électricité à près de 250 millions de foyers en Afrique de l’Ouest. Ce projet nécessiterait des investissements initiaux d’environ 100 milliards de dollars, mais il permettrait une réduction drastique de la pauvreté énergétique tout en renforçant l’autonomie énergétique du continent.

Les terres arables : un potentiel agricole inexploité

L’Afrique possède environ 60 % des terres arables non cultivées dans le monde, pourtant elle reste l’un des continents les plus dépendants des importations alimentaires. Si seulement 10 % de ces terres étaient exploitées de manière moderne, cela représenterait près de 200 millions d’hectares, soit deux fois la taille de la France. En utilisant des techniques agricoles de pointe, telles que les drones pour la surveillance des cultures, l’irrigation intelligente et les technologies IoT (Internet of Things) pour la gestion de l’eau, ces terres pourraient nourrir plus de 1,2 milliard de personnes, assurant ainsi la sécurité alimentaire non seulement pour l’Afrique mais aussi pour d’autres régions du monde.

Rizière vue du Ciel

Les investissements dans des infrastructures agricoles, comme des fermes mécanisées et des chaînes logistiques modernes, pourraient transformer des pays comme le Soudan, le Mozambique, et la Zambie en greniers agricoles mondiaux. En comparaison, des nations comme le Brésil ont transformé leurs vastes terres en pôles d’agro-industrie, devenant des leaders mondiaux dans la production de soja, de maïs, et de viande bovine. Un développement similaire en Afrique pourrait créer des millions d’emplois et augmenter significativement les revenus des agriculteurs locaux.

Exemples de pays ayant su exploiter leurs ressources

Certains pays en dehors du continent africain ont su tirer pleinement parti de leurs ressources naturelles pour se développer de manière spectaculaire. Voici des exemples de pays qui pourraient servir de modèles tant ils ont su capitaliser sur les ressources qui étaient les-leurs :

La Norvège, grâce à son pétrole, a constitué un fonds souverain qui investit les revenus pétroliers dans des actifs durables, garantissant ainsi la prospérité des générations futures. Ce modèle pourrait inspirer des pays comme le Nigeria.

L’Australie, grâce à ses ressources minières (fer, bauxite, or), a bâti une économie diversifiée et résiliente, tout en investissant massivement dans les technologies vertes. Des pays africains comme la RDC et la Zambie pourraient s’en inspirer pour exploiter leurs richesses en cuivre et cobalt de manière plus stratégique.

Le Qatar, autrefois un petit pays désertique, est devenu l’un des plus riches au monde grâce à son gaz naturel et ses investissements dans les infrastructures. Des nations africaines comme le Mozambique, avec ses récents gisements de gaz, pourraient suivre cet exemple en développant leurs propres secteurs énergétiques.

Conclusion : L’Afrique au carrefour des opportunités

Si l’Afrique investissait dans l’exploitation de ses ressources de manière durable et équitable, elle pourrait non seulement rattraper son retard économique, mais aussi se positionner comme un acteur incontournable dans des secteurs stratégiques tels que les énergies vertes, la technologie de pointe, et l’agriculture. Des investissements concrets dans les secteurs de l’énergie solaire, des infrastructures agricoles et de la transformation des ressources minières pourraient changer la donne pour le continent tout entier.

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